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mardi 19 juillet 2022

Décadence (Michel Onfray)

 


Onfray a abandonné depuis longtemps la ligne commode du politiquement correct. Il dirige une intéressante revue intitulée Front populaire et continue à publier des livres à un rythme effréné. Décadence est le second tome d’une trilogie qui commence avec le panthéiste Cosmos et s’achève sur le philosophique Sagesse. Ce volume nous a paru d’un haut intérêt puisqu’il s’attaque au judéo-christianisme dans tout ce qu’il a de néfaste et de délétère pour notre civilisation. Cet inventaire est édifiant. De Paul le prédicateur fou au concile de Vatican II, le règne du monothéisme aura entraîné l’Europe dans un processus de décadence qu’Onfray décrit par le détail tout au long de ces 800 pages. L’Inquisition, les croisades, les guerres de religion, la Révolution, les totalitarismes soi-disant athées et matérialistes mais qui fonctionnent comme des religions (intéressantes informations sur un Hitler qui aurait eu des accointances avec le christianisme, à prendre ou à laisser…). Tout est lié. La secte prosélyte est parvenue à triompher de Rome au point d’y installer carrément son Église. L’ennemi était d’abord dans la cité, et non aux frontières de l’Empire… Une réalité qu’on a tendance à oublier dans nos sociétés contemporaines gangrenées pas l’intégrisme religieux.

Le Parthénon (François Queyrel)

 

Histoire mouvementée que celle du Parthénon. C’est à se demander comment ce monument de la mémoire européenne est encore debout. François Queyrel, spécialiste de l’archéologie grecque, nous livre tout ce qu’il convient de savoir sur cette institution vieille de plus de vingt-cinq siècles, refuge d’Athéna Polias, déesse de la cité et de la victoire, et symbole de notre histoire. L’édifice a subi les outrages du temps, mais également des invasions et des batailles. Ses frises ont été saccagées, démantibulées, dispersées dans divers musées. Queyrel a procédé à une reconstitution des quatre frontons, en particulier grâce au travail d’un artiste qui les a reproduites avant l’explosion de 1687 – alors que le monument, occupé par les Ottomans, servait de dépôt de munitions ! – et, entre autres déprédations, le pillage du Britannique Elvin.

Une étude intéressante qui s’attarde peut-être un peu trop sur la description des frises mais qui a le mérite de ne rien omettre de l’histoire comme du devenir du monument ancré dans le sol sacré de l’Acropole. « Le Parthénon, incarne véritablement les dieux d’Athènes en les liant à la Terre mère », écrit Queyrel. Aujourd’hui, il est pour nous bien plus que cela ; souvent pillé, dégradé, profané, mais toujours debout !

jeudi 2 avril 2015

Le Songe d'Empédocle (Christopher Gérard)


Le précédent tirage de ce roman étant épuisé, et eu égard surtout à sa qualité, il était souhaitable de procéder à une réédition (première parution en 2003). C'est chose faite avec, en prime, une version révisée par l'auteur.

Qui n'a pas connu ou fréquenté Christopher Gérard découvrira un écrivain digne d'une civilisation qui ne cherche pas à se fondre dans l'universalisme et la globalisation ambiantes ; une civilisation - nous dirons : indo-européenne - animée par les mânes et la pensée de ses grands anciens, héros, éducateurs et esprits intrépides. Depuis Jünger et Montherlant, peu nombreux sont, hélas, les auteurs qui ont un héritage à transmettre. Avec Le Songe d’Empédocle, pour ainsi dire au cœur de l'œuvre de Christopher Gérard, la relève semble assurée. Celui-ci a rejoint en effet le cercle très fermé des authentiques écrivains païens qui, contre bigots et dévots, ont fait le choix de consacrer au vaste monde des sens et des idées. Il n’est pas anodin que Jean Mabire, Gabriel Matzneff, Alain Daniélou (et peut-être aussi Arno Breker...) soient évoqués dans cette histoire. Ces figures n'ont-elles pas brandi le flambeau d'Athènes, de Rome, d'Avalon, de Bénarès et, plus généralement, d'une transcendance qui aura forgé l'âme d'une grande civilisation ? Du moins Oribase, le héros de Gérard, voyage-t-il en excellente compagnie. A sa suite, le lecteur se trouve convié à emprunter un itinéraire qui ne doit rien à l’errance et au hasard. De la forêt de Brocéliande aux rives du Gange, en passant par le Capitole, le jeune homme franchit peu à peu les étapes de son initiation auprès de quelques sages, hommes remarquables, éveillés et initiés dont on n'ose plus croire à l'existence. Un parcours hautement édifiant où l'on sent que l'auteur s'est investi pour fournir au lecteur (attentif !) une multitude de pistes, de repères et d'indices, l’encourageant à échapper à la médiocrité, à l'exténuation et à la perte de mémoire. Plus qu'un hommage sincère aux dieux et à la volonté d’être, ce livre invite à une incursion dans le champ du possible tout à fait stimulante.

dimanche 5 octobre 2014

La chute de Berlin (Antony Beevor)


Après Stalingrad, l'historien britannique Antony Beevor procède à la restitution de la chute de la capitale du Reich. Plus qu'un livre d'histoire, c'est aussi une étude sur la nature humaine, ses caractères, ses forces et ses faiblesses. Y sont aussi pointées les lourdeurs de la bureaucratie nazie, les désillusions de ses généraux (Paulus) et le jusqu'au boutisme (le suicide programmé des six enfants de Goebbels). Mais ce qui frappe plus encore dans ce livre c'est l'évocation des souffrances et des sacrifices du peuple allemand, un peuple, propagande aidant, qui n'était pas préparé à la défaite. Au plus fort de la débâcle, le général Strecker ne pourra s'empêcher de formuler : « Qu'a donc fait l'Allemagne à Dieu pour qu'il nous ait envoyé Hitler ? » Rien ne va plus et notamment avec l'arrivée du rouleau compresseur bolchévique qui, pour entrer dans Berlin avant les Alliés, se montre prêt à envisager les pertes humaines les plus lourdes dans ses rangs mêmes. Sur l'avancée soviétique, Breevor fait remarquer qu'elle aurait été grandement retardée sans le concours des nombreux camions prêtés par les Etats-Unis. Cette marche contre le fascisme provoquera des dégâts considérables : en sus des morts, deux millions de femmes violées. Le torpillage par les Russes du navire-hôpital Goya témoigne entre autres de leur farouche volonté de destruction. Il est étonnant de voie ensuite la connivence s'installer entre Berlinois et occupants soviétiques. Etonnant également de voir de quelle manière seront traités les communistes allemands par leurs supposés libérateurs : ceux-ci ne pouvant admettre en effet que les ouvriers n'aient montré aucune opposition à l'invasion de l'URSS et que les seules tentatives d'éliminer Hitler furent issues des milieux « réactionnaires ». Mais il y a bien plus dans ces six cents pages d'Histoire qui se lisent comme un roman.


mardi 9 septembre 2014

Tour César (Provins)


Midi


Court Serpent (Bernard de Boucheron)






Court Serpent est le nom d'une embarcation affrétée par l'Église afin d'aller secourir une lointaine communauté de Nouvelle Thulé en danger, faute d'évêque, de retourner à l'infidélité. À son bord, l'abbé Montanus (sic !) et quelques hommes de nage déterminés. Le récit s'appuie principalement sur le rapport de cet ''inquisiteur ordinaire et extraordinaire'' qui expose la façon dont lui-même et ses acolytes tenteront de remettre le diocèse de Gardar sur la voie conforme à l'enseignement christique. On frémit à la lecture de ce condensé des méthodes employées par la chrétienté féodale, missionnaire et inquisitoriale, pour porter la bonne parole à ces peuples à l'âme païenne et hyperboréenne qui tentent de survivre à une époque trouble dans les lieux les plus isolés – en l'occurrence sur la côte ouest de l'actuel Groënland. Ils ont préféré l'hostilité de la nature à la folie des hommes. Mais celle-ci les a rattrapés au nom de Dieu. C'est violent, chargé de désespoir, de maladies, de viols, de famine, de pendaisons. C'est le portrait d'une époque sombre qu'un monothéisme fiévreux s'acharna à soumettre.
Après une carrière passée à décider et gérer les affaires du grand capital, Bernard de Boucheron a résolu de se consacrer à l'écriture. Le capital a peut-être perdu un capitaine, mais la littérature a gagné un auteur talentueux et plutôt fréquentable.

lundi 8 septembre 2014

Reims


Temple romain de Château-Bas (13)


Tacite, ses vérités sont les nôtres (Xavier Darcos)


Xavier Darcos est membre de l'Institut et docteur en études latines. Il était tout désigné pour évoquer l'oeuvre de Tacite. Tâche dont il s'acquitte brillamment. L'auteur des Annales et des Histoires a procédé à une analyse sans compromis sur l'histoire de ses contemporains et ceux qui leur ont précédé. Mais il ne se contente pas de rapporter les faits : il en tire les leçons nécessaires. Rome n'a pas su, selon lui, trouver la voie "entre une résistance stérile et une servilité déshonorante, trouver une route exempte de bassesse et de périls". Et ce ne sont pas, dans le cours de l'Histoire, les mœurs qui remplacent les mœurs mais les hommes qui remplacent les hommes, et le plus souvent des hommes exempts de vices plutôt que doués de vertus. Ainsi, il dit de Corbulon qu'il "avait une tâche plus lourde face à la mollesse des soldats que contre la perfidie des ennemis". Et que d'autres excellaient dans l'art de faire passer leur inertie pour de la sagesse. De citations en citations, sans omettre d'ajouter sa touche personnelle, Xavier Darcos nous fait découvrir ou redécouvrir un habile narrateur doublé d'un observateur implacable, et le lecteur ne s'ennuie pas.

Robert Surcouf (1773-1827)