lundi 8 septembre 2014

De la France (Cioran)


Ce petit traité composé dans le Paris occupé de 1941 nous entretient de la France et de son goût désormais affirmé pour la décadence. Cioran aime et admire pourtant cette France où il a trouvé asile. Il s'est abreuvé au style de ses moralistes, a vibré à la fréquentation des œuvres de ses poètes et de ses musiciens. Cependant, il ne peut s'empêcher de la vilipender avec le cynisme et la rage froide qui plus tard s'affirmeront dans son Bréviaire des vaincus. Il se sent fécondé par la vue de ces Français des croisades devenus Français du bien-être et de l'ennui, « de la cuisine et du bistrot ». Il note avec une fiévreuse jubilation que le spectacle de ces combats menés désormais pour la réplétion et l'opulence ouvrent peut-être la voie à l'épuisement général des autres nations. Ce peuple « qui se momifie dans le doute », qui vit sur les ruines des exploits du passé et qui cependant parvient à être dégoûté de lui-même le fascine. (« Un pays tout entier qui ne croit plus à rien, quel spectacle exaltant et dégradant ! ») Une diatribe chargée de considérations intempestives mais ô combien lucides qui méritait d'être enfin révélée au grand public.

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