mercredi 10 septembre 2014

Présence de la nature (Marcel Conche)


Marcel Conche, fils de paysans corréziens, est professeur émérite à la Sorbonne. Il est connu pour ses écrits sur les philosophes grecs. Ses maîtres et compagnons de route se nommant Héraclite, Démocrite et Platon, il est normal qu'il ait fait appel à eux pour rédiger cet essai sur et autour de la nature. On s'aperçoit en le parcourant que le domaine est vaste, qu'il permet de disserter sur le néant, le monde, l'univers et bien d'autres aspects ou non aspects de notre environnement immédiat. C'est aussi pourquoi, outre les philosophes atomistes, Conche convoque la pensée d'Epicure, de Pascal et de Montaigne pour tenter d'appréhender la nature et en particulier à déterminer quelle est sa relation au temps. A la suite d'Heidegger, il explore les chemins de l'être et de l'étant. Tout cela nous ramène immanquablement à l'intelligence, aux sens et à cette « nuit que l'homme est à lui-même », pris entre fini et infini.

La matière de ce livre, suite de textes inédits, parus dans des revues ou prononcés lors de conférences, autorise aussi son auteur à emprunter quelques chemins de traverse. A cette pudeur qui le caractérise, il confie la difficulté de penser en s'extrayant de l'actualité, du non durable, ainsi que s'y sont astreints ses prédécesseurs grecs. Qu'est-ce qui peut garder une signification à n'importe quel stade de l'histoire humaine ? questionne-t-il. La réponse est sans détour : aller à l'essentiel, nous déposséder de l'ostentatoire, des richesses et de la notoriété ; voici au fond l'axe principal de la philosophie.Il n'est du reste nul besoin d'avoir usé les bancs de l'Université pour « gagner » en authenticité. Une forme de vie qui ne peut être conçue qu'en prêtant l'oreille à ces démons qui invitent à la désobéissance civile.
Dans la dernière partie de l'ouvrage, Conche décrypte la poésie de Rimbaud – tout comme celle contenue dans la correspondance de Rosa Luxemburg. Puisque la poésie est fondée à s'exprimer sur la Nature et ses arcanes (selon Heidegger, il n'est pas de meilleure approche du langage que cet art qui nomme le sacré).
Conche est un penseur atypique. Il l'a montré dans ses livres. Présence de la nature ne déroge pas à cette règle. Il sort du lot de la production actuelle où Onfray s'enfonce dans le verbiage, Comte-Sponville dans la vulgate et Ferry dans sa vaine (bien que courageuse) tentative passée d'appliquer quelques préceptes de la République de Platon à l'éducation de nos enfants. Une lecture parfois ardue mais d'un intérêt certain.


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